Oradour-sur-Glane

Oradour-sur-Glane (Orador de Glana en occitan limousin, prononcé Ouradour dé Guiâno) est une commune française située dans le département de la Haute-Vienne et la région Limousin. Ses habitants sont appelés Radounauds, Radounaux ou Radounales.
Le nom d'Oradour, qui vient du mot latin oratorium, indique qu'il y avait là, dès l'époque romaine, un oratoire, c'est-à-dire un autel et un lieu de prières pour les morts, qu'on enterrait alors au bord des routes et souvent au voisinage des carrefours, ou bien une petite chapelle privée adjointe à une grande maison (palais, château ou hôtel).



Le nom d'Oradour-sur-Glane reste attaché au massacre de sa population par la division SS Das Reich le 10 juin 1944. La petite cité est aujourd'hui divisée en deux entités, dont le centre de la mémoire constitue en quelque sorte le trait d'union : l'ancien village, conservé à l'état de ruine, qui témoigne des souffrances infligées aux hommes, femmes et enfants de cette petite bourgade, et le nouveau village, reconstruit quelques centaines de mètres plus loin.

Oradour-sur-Glane était alors une bourgade limousine active et ordinaire, avec ses commerces, cafés-hôtels, boutiquiers et artisans. Elle vit principalement de l'agriculture jusqu'à la crise du secteur, qui fait se dépeupler les campagnes. Il ne reste en effet plus que deux exploitations agricoles en 1944 sur la commune.

Au début du XXe siècle, le village se modernise avec notamment l'arrivée de l'électricité et des chemins de fer départementaux de la Haute-Vienne, qui le relient à Limoges, distante d'une vingtaine de kilomètres au sud-est. Le recensement de 1936 fait état d'une population de 1 574 âmes. Outre tous ses commerces, Oradour possède une harmonie municipale, une société de pêche et trois écoles.

La guerre en 1940 mobilisa 168 hommes de la commune. 113 hommes purent rentrer au village dès l'armistice.

Malgré la proximité des résistants et l'accueil de réfugiés lorrains (Charly-Oradour, village mosellan, fut nommé ainsi en hommage aux victimes, dont 39 venaient du petit village), le village fut relativement épargné par la guerre jusqu'au massacre. La population, comme dans la plus grande partie de la France, après avoir adhéré aux idées et à la personne du Maréchal Pétain, émit des critiques de plus en plus virulentes à l'égard de la politique collaborationniste, attendant fermement une victoire des Alliés

Massacre d'Oradour-sur-Glane

es auteurs du drame appartiennent à la 3e compagnie du 1er bataillon de Panzergrenadier (commandé par le major Adolf Diekmann) du 4e SS-Panzer-Regiment Der Führer de la 2eSS-Panzer-Division Das Reich.

Au repos autour de Bordeaux et de Montauban, la division fait mouvement vers la Normandie aussitôt connu le débarquement allié. Constamment harcelée par les Forces françaises de l'intérieur (FFI), elle riposte par de sanglantes représailles.

Le 9 juin 1944, à Tulle libérée depuis l'avant-veille par la Résistance, 99 hommes sont pendus.

Le 10 juin 1944, après l'arrivée des Allemands dans le bourg d'Oradour-sur-Glane, le garde champêtre fait savoir aux habitants qu'ils doivent tous se rassembler, sans aucune exception et sans délai, sur le Champ de Foire, munis de leurs papiers, pour une vérification d'identité.

Les SS pénètrent dans toutes les maisons, et, sous la menace de leurs armes, obligent tout le monde, même les malades, à se rendre sur le lieu de rassemblement. Un à un ou par groupes, conduits et surveillés par les SS, les villageois se massent peu à peu sur le Champ de Foire. Les Allemands vont aussi chercher des habitants des hameaux voisins. Les cultivateurs doivent abandonner leurs travaux. Plusieurs personnes sont abattues.

Les Allemands divisent la population en deux groupes : d'un côté les femmes et les enfants, de l'autre les hommes.

 

 

Massacre des hommes

Les hommes sont répartis entre six lieux de supplices : ils y sont mitraillés puis leurs corps sont recouverts de fagots et de bottes de paille auxquels les SS mettent le feu. Selon quelques rescapés, les SS tirent bas et dans les jambes de leurs victimes ; le feu est allumé sur des hommes encore vivants. La déclaration d'un rescapé établit qu'ils parlaient encore ; certains, légèrement blessés, ont pu s'échapper, la plupart des autres ont certainement été brûlés vifs.

Massacre des femmes et des enfants

Le groupe enfermé dans l'église comprend toutes les femmes et tous les enfants du village. Des soldats placent dans la nef, près du chœur, une sorte de caisse assez volumineuse de laquelle dépassent des cordons qu'ils laissent trainer sur le sol. Ces cordons ayant été allumés, le feu se communique à l'engin, qui contient un gaz asphyxiant (c'était la solution prévue) et explose par erreur ; une fumée noire, épaisse et suffocante se dégage. Une fusillade éclate dans l'église ; puis de la paille, des fagots, des chaises sont jetés pêle-mêle sur les corps qui gisent sur les dalles. Les SS y mettent ensuite le feu. La chaleur était tellement forte qu'à l'entrée de cette église on peut voir la cloche fondue, écrasée sur le sol. Des débris de 1,20 m de hauteur recouvraient les corps.

Une seule femme survit au carnage : Marguerite Rouffanche, née Thurmeaux. Son témoignage constitue tout ce qu'il est possible de savoir du drame. Elle a perdu dans la tuerie, son mari, son fils, ses deux filles et son petit-fils âgé de sept mois.

Le chœur de l'église comprenant trois fenêtres, Mme Rouffanche se dirigea vers la plus grande, celle du milieu et à l'aide d'un escabeau qui servait à allumer les cierges elle parvint à l'atteindre. Le vitrail étant brisé, elle se précipita par l'ouverture. Après un saut de trois mètres, elle atterrit au pied de l'église et fut blessée par un SS en gagnant un jardin voisin. Dissimulée parmi des rangs de petits pois, elle ne fut délivrée que le lendemain vers 17 heures.

Le temps s'est arrêté : rue avec rails du tramway départemental

Autres massacres

Les SS inspectent de nouveau les maisons du bourg ; ils y tuent tous les habitants qui avaient pu échapper à leurs premières recherches, en particulier ceux que leur état physique avait empêchés de se rendre sur le lieu du rassemblement. C'est ainsi que les équipes de secours trouveront dans diverses habitations les corps brûlés de quelques vieillards impotents.

Un envoyé spécial des FFI, présent à Oradour dans les tout premiers jours, indique qu'on a recueilli dans le four d'un boulanger les restes calcinés de cinq personnes : le père, la mère et leurs trois enfants.

Un puits renfermant de nombreux cadavres est découvert dans une ferme : trop décomposés pour être identifiés, ils seront laissés sur place.

Au total, 642 personnes ont été massacrées lors de cette journée.

 

 

Peugeot 202 du médecin au milieu des ruines

 

 

Procès et réactions

Après huit années d'attente le procès de 21 soldats — sur 64 identifiés — ayant participé au massacre d'Oradour a lieu en janvier-février 1953 devant le tribunal militaire de Bordeaux. Adolf Diekmann, le commandant SS, ne sera pas jugé car il est mort sur le front de Normandie ; il est enterré au cimetière normand de la Cambe. Le 12 février 1953, le tribunal prononce les peines suivantes :

le militaire allemand le plus gradé est condamné à mort ;
un autre Allemand qui a pu prouver son absence d'Oradour le 10 juin est relaxé ;
quatre autres Allemands sont condamnés à des peines de travaux forcés de dix à douze ans ;
le seul Alsacien volontaire du groupe est condamné à mort ;
neuf Alsaciens sont condamnés à des peines de travaux forcés de cinq à douze ans ;
les quatre autres Alsaciens sont condamnés à des peines de prison de cinq à huit ans.

La population alsacienne proteste contre les peines infligées aux Malgré-nous, car ceux-ci ont été contraints d'exécuter les ordres des supérieurs allemands. Le procès de Bordeaux symbolise en quelque sorte le malaise alsacien : la population française n'a, dans sa grande majorité, pas connaissance du drame des 130 000 Alsaciens et Mosellans incorporés de force dans les armées allemandes. Quant aux familles des victimes - et au Limousin en général -, ils trouvent les sentences scandaleusement indulgentes : d'après eux, tous les participants au massacre auraient dû être condamnés à mort.
Image aérienne du village détruit.

La loi d'amnistie votée dès le 19 février accentue ce sentiment d'outrage. La riposte d'Oradour est immédiate. Citons :

la demande pour qu'on lui rende le site commémoratif,
la décision de l'ANFM5 de renvoyer la Croix de Guerre décernée à Oradour en 1947, ainsi que la Légion d'honneur décernée à l'association en 1949,
le refus de transférer les cendres des martyrs dans la crypte construite par l'État,
le refus de la présence de représentants de l'État aux cérémonies commémoratives (l'exception étant la visite du Général de Gaulle en 1962),
l'inscription sur une plaque à l'entrée des ruines des noms des députés qui avaient voté l'amnistie.

Le collectif « Maquis de Corrèze », dirigé par le député honoraire Pierre Pranchère, s'oppose au projet de loi voté au Sénat en 2008 portant adaptation du droit pénal français à la Cour pénale internationale. En effet, ce texte prévoit une prescription des crimes de guerre par trente ans (article 462-10), ce qui revient à déclarer une amnistie pour les responsables des massacres de Tulle et d'Oradour.

Le centre de Mémoire est un appel à la réflexion, moyennant 7,5 € par adulte, pour éviter que d'autres massacres n'aient lieu et ainsi perpétuer la notion de devoir de mémoire.

Village martyr

Après la guerre, le général de Gaulle décide que les ruines du village ne seront pas reconstruites. Devenues propriété de l'état, elle se dressent comme un mémorial à la douleur de la France sous l'Occupation, et un appel à ne jamais oublier.

En 1999, le village est consacré « village martyr » par le président Jacques Chirac. Depuis cette date, le centre de la mémoire sert de trait d'union entre le nouveau village et les ruines. Grâce à des expositions permanentes permettant de mieux comprendre le contexte historique, ce centre de documentation prépare le visiteur au choc que représente le village martyr.

Les maisons et édifices publics à demi calcinés témoignent de la rage meurtrière qui s'est abattue sur le petit village en ce début d'été 1944. En suivant la rue principale, on accède à la place du champ de foire. Des plaques apposées sur les maisons signalent les différents lieux de supplice et invitent au recueillement et à la réflexion. Les principaux monuments de ce petit bourg limousin, que rien ne destinait à être le symbole de la barbarie, sont encore bien visibles : l'hôtel des postes, l'école primaire, l'ancienne église Saint-Martin enfin, où périrent 500 femmes et enfants. Les ruines des maisons conservent encore de maigres éléments de mobilier, rouillés et vermoulus, tandis que les rues sont encore jonchées de quelques carcasses de voitures d'époque, et des restes de rails de l'ancien tramway départemental.

La visite de la maison du souvenir où sont rassemblés des objets ayant résisté aux flammes et celle du cimetière où reposent dans un ossuaire les restes calcinés des victimes laissent un souvenir impérissable.

L'ensemble du village martyr est classé monument historique depuis le 10 mai 1946

Ancienne église Saint-Martin

L'ancienne église Saint-Martin, située au cœur du village martyr, est devenue un des symboles de la tragédie du 10 juin 1944. C'est dans ses murs qu'ont été enfermés et assassinés plusieurs centaines de femmes et d'enfants de tous âges. Une seule femme a pu se hisser hors du brasier par une baie dont le vitrail était cassé et ainsi échapper au massacre. Une plaque apposée sur le mur invite les visiteurs au souvenir.

Modeste par ses dimensions, ses parties les plus anciennes datent du XIIe siècle. C'est de cette époque que date le chœur, qui conserve sa voûte romane, en berceau brisé. La nef et ses chapelles latérales sont refaites au XVe siècle, et couvertes de croisées d'ogives (disparues dans l'incendie de l'église, mais dont on voit encore le départ). Les guerres de religion conduisent à fortifier l'édifice, dont le clocher, qui se voit doté de deux tours d'angles en forme d'échauguettes.

Au XIXe siècle, l'église connaît plusieurs campagnes de restauration : le pavage et les voûtes sont refaits en 1838, de même que la charpente du clocher. De nouveaux vitraux sont mis en place à cette même époque. L'édifice est de nouveau réparé de 1860 à 1864 : la toiture est couverte de nouvelles tuiles creuses et la flèche du clocher (et des deux tours d'angles) est refaite en ardoise19.

Une statue de saint Victurnien, autrefois conservée dans l'église, a été retrouvée après l'incendie. Datée du XVe siècle, cette œuvre mutilée (nez, mains et pieds ont disparu, et la statue a souffert des flammes) est classée au titre d'objet par les monuments historiques

La reconstruction

Si l'on décida de laisser l'ancien village tel qu'il était à la suite du massacre, l'édification du nouveau bourg de la commune d'Oradour-sur-Glane fut envisagée sur un autre emplacement dès juillet 1944. En raison de complications liées au droit de propriété et aux successions des victimes du massacre, la voie législative doit simplifier le processus. Ainsi, une ordonnance liant conservation et reconstruction est élaborée par le ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme. Elle est modifiée en tant que loi, votée et promulguée en mai 1946, condition du classement du site en tant que monument historique, d'expropriation des ayants droit, et à l'édification du nouveau village par utilisation des crédits des dommages de guerre qui toutefois s'avèreront insuffisants.

C'est le Président Vincent Auriol qui pose la première pierre, le 10 juin 1947. Le nouveau bourg, qui se doit d'être « exemplaire » (allusion notable au pilotage de l'Etat plus qu'à l'alliance décidée entre inspiration régionaliste et épuration du style moderne), sortit finalement de terre à l'ouest de l'ancien village-martyr dès 1949, les frais de reconstruction restant entièrement à la charge de l'État.

 

 

Nouvelle église Saint-Martin

La nouvelle église est édifiée à quelques centaines de mètres du village martyr. Dessinée par l'architecte Paul Villemain, elle sort de terre à partir de 1952 et est achevée en un peu plus d'un an (bénédiction des cloches le 12 juillet 1953). Cette construction au style un peu académique reste modeste par ses dimensions et par son vocabulaire architectural. Basée sur un plan en croix grecque, elle est inondée de lumière par une série de trois murs-rideaux comportant de fines baies rectangulaires, ornées de vitraux modernistes de Francis et Pierre Chigot (sur le dessin de Pierre Parot).

La façade est une interprétation libre des canons antiques. Le portail, qui s'inscrit dans une immense arcade rectangulaire, abrite des fresques relatant la vie de saint Martin, œuvre de l'artiste Burkhalter. Un dossier portant sur une éventuelle inscription ou un classement aux monuments historiques est en cours d'étude21.

Jouxtant l'église (côté est) une statue d'Apel·les Fenosa est dédiée aux martyrs d'Oradour.

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